Les gauchers ont-ils plus de difficultés en écriture ?
Théoriquement, pas vraiment: si un gaucher a bien appris à tenir son crayon et à placer sa feuille et son bras, il n’y a que peu de raisons d’avoir d’avoir plus de mal à écrire qu’un droitier. On sait bien que dans la réalité, c’est rarement le cas et que, pour s’adapter au cahier, au bureau, au fait que l’on écrit de gauche à droite, ils sont souvent contraints, au moment de l’apprentissage, d’inventer des positions incroyables pour parvenir à voir ce qu’ils écrivent tout en évitant de gêner le voisin… La rééducation va alors permettre de trouver une posture et tenue de crayon confortables et efficaces.
Lorsqu’il y a un doute concernant l’utilisation de la main droite ou gauche pour écrire, je n’hésite pas à faire passer à l’enfant ou au jeune un test de latéralité. Dans de rares cas, la main choisie pour écrire n’est pas la main dominante pour l’enfant ce qui peut être préjudiciable et inconfortable pour lui. C’était plus fréquent il y a quelques dizaines d’années: on contrariait volontairement les gauchers, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui, heureusement. Mais parfois, pour plein de raisons involontaires (en imitant son parent ou son enseignant par exemple), cela arrive. Il existe même des droitiers contrariés ! La relatéralisation, si l’enfant est d’accord, consiste alors à changer de main pour écrire. Cela nécessite des efforts (le nombre de séances est alors exceptionnellement plus important: environ 10) mais amène au final un vrai confort. Chez les adultes, suite à un accident ou à des douleurs, un changement de main peut aussi un être proposé, la motivation permet d’atteindre d’excellents résultats.
On a le sentiment d’avoir tout essayé: pendant un an, on a fait faire des lignes et des lignes tous les soirs à notre fille, son écriture ne s’est pas vraiment améliorée, la rééducation va-telle aider après tout ça ?
Cela part d’un bon sentiment mais les lignes ne servent pas à grand chose si la tenue de crayon, la posture et le geste graphique lui-même ne sont pas corrigés. J’imagine que parfois, cela aide un peu, mais ce que je constate c’est que cela risque juste… de l’écoeurer. Vous n’êtes pas la seule dans ce cas et en général, les enfants sont rassurés de voir que ce n’est pas ce que l’on va leur demander ; )
Le travail quotidien est-il vraiment indispensable ?
Absolument ! Certaines séances peuvent dénouer des difficultés mais il faut du temps et un entraînement journalier pour que le geste d’écriture s’automatise. L’écriture met en jeu de nombreuses habiletés, la compréhension intellectuelle ne suffit pas et répéter le geste de manière quasi quotidienne permet de l’ancrer et de libérer le cerveau pour réfléchir au texte.
Est-ce utile d’acheter des cahiers de graphisme ou de préparation à l’écriture en prévention ?
Difficile de répondre à cette question. Personnellement, je suis parfois réservée vis-à-vis des nombreux cahiers qu’on trouve dans le commerce. Il faut être vigilant et éviter qu’ils présentent des inconvénients comme de mauvaises polices de caractère, l’idée de repasser exclusivement sur les pointillés (ce qui a tendance à installer de la lenteur et des reprises). Parfois les gestes pour les lettres ne sont pas ceux que je conseillerais, voire, ils incitent à « dessiner » les lettres plutôt qu’à préparer le geste pour la cursive. Il vaut mieux laisser les enfants dessiner librement !
Je suis étudiant, mon concours est dans 2 mois, est-il trop tard pour me rééduquer ?
Non, dans ce cas, nous pourrons rapprocher les séances de 15 jours en 15 jours et travailler l’essentiel. Les rééducations vont souvent assez vite dans ces cas là, d’autant qu’il y a la motivation ! Cela demandera tout de même une bonne implication chaque jour (15 min tous les jours sans exception ! ;).
Mon enfant vient de rentrer à l’école maternelle, il a 3 ans, et la maîtresse me dit que le graphisme, c’est pas son truc, puis-je venir consulter ?
C’est un peu trop tôt ! Pas de rééducation avant 4-5 ans (fin de moyenne section). Proposez-lui des petits jeux et manipulations, en particulier beaucoup de pâte à modeler, pâte à sel
On propose à mon enfant un PAI lui permettant d’avoir un ordinateur en classe, pouvez-vous l’aider dans ce cas-ci ?
On peut en discuter. Chaque cas est différent, souvent, en cas de dyspraxie, l’ordinateur est proposé comme un complément à l’écriture manuscrite, mais qui demande de gros efforts à l’enfant accompagné de son ergothérapeute. C’est une solution, ce n’est parfois pas la seule. On peut tenter d’améliorer voire de restaurer son écriture, il s’agit de le faire au bon moment pour lui. Parfois, des enfants qui ont eu l’ordinateur pendant tout le collège, tentent une rééducation à 16 ans, par exemple, avec la motivation de pouvoir communiquer plus facilement à l’écrit (textes courts) dans le cadre du travail (écrire quelques mots sur un carnet). Parfois, les parents font le choix de tenter la rééducation si l’enfant et la famille sont motivés, ou bien de travailler l’écriture manuscrite au moins pour conserver une autonomie dans la vie quotidienne. Il s’agit dans tous les cas de ne pas faire violence à l’enfant (pas trop de suivis en même temps dans la semaine) et de travailler en bonne intelligence avec l’équipe qui le suit.
Nous sommes divorcés avec le papa de mon fils et en garde alternée, la personne accompagnatrice doit-elle toujours être la même ?
A vous d’en discuter entre vous. Je reste disponible au téléphone pour donner les petits conseils. Les enfants partent en général avec une petite fiche d’exos rapides.
Votre cabinet est-il accessible aux fauteuils roulants ?
Oui ! Il faudra juste aussi me prévenir car l’accès avec rampe se fait par l’arrière du bâtiment et je devrais donc venir vous ouvrir en personne. Il faut pousser un peu un meuble de la salle d’attente qui est plutôt petite mais ça marche ! Le cabinet est petit aussi mais une fois qu’on y est installé, on l’oublie !
J’ai plusieurs élèves qui changent de main tout le temps, je n’arrive pas à savoir s’ils sont gauchers ou droitiers.
J’imagine que vous enseignez en maternelle si vous posez la question. Laissez-les changer de main et faites-leur faire les exercices de motricité des deux mains, la latéralisation prend parfois un peu de temps. Petit conseil pour les enseignants et les parents: pour parvenir à deviner quelle est la main dominante, il faut regarder quelle main utilise spontanément l’enfant pour des activités autres que l’écriture: prendre un objet, tirer la fermeture éclair, boire un verre d’eau, se passer le gant de toilette…
Les deux se chargent de remédier aux difficultés d’écriture. L’approche est néanmoins sensiblement différente. Le graphothérapeute établit un bilan au départ que le graphopédagogue ne fait que sur demande pour diminuer le coût de la rééducation. Les séances sont souvent hebdomadaires, sur une longue durée. La graphothérapie a une approche plus axée sur l’analyse psychologie: autant qu’une thérapie de l’écriture, elle se veut thérapie par l’écriture. Bien sûr, le graphopédagogue, étant enseignant, est à l’écoute et prend soin de la psychologie de l’enfant ou du jeune, parfois, en séance, des choses s’expriment et se dénouent chez l’enfant… et/ou le parent. Mais il n’est pas question d’analyser qui que ce soit par son écriture. Par contre, il est fréquent de constater un mieux-être, une meilleure estime de soi. A noter que certains graphothérapeutes empruntent parfois les outils de la graphopédagogie : tout n’est pas question de psychologie, il y a aussi des réalités, si on mal appris à écrire parce qu’on avait le bras dans le plâtre l’année de CP, c’est compliqué et un accompagnement sera bienvenu. Je dis souvent à mes élèves que je suis enseignante, rééducatrice, « maîtresse d’écriture ». J’aurais tendance à conseiller d’aller vers le professionnel que vous sentez, c’est une question d’approche et de rencontre aussi.
Ponctuellement, oui ! Mais pour toute une rééducation, non ! Etant donné tout le travail en motricité fine, il est bien plus aisé de travailler en face à face. Néanmoins, en cas de difficulté d’emploi du temps, de contrainte de trajet, la visio peut être utile ponctuellement. Cela demandera souvent un peu plus de temps (1h) et de la concentration des deux côtés de l’écran !
Depuis que mon ado s’est mis à écrire tout en script à l’entrée en sixième, il ne veut plus entendre parler de la cursive, est-ce un problème ?
A priori, non, s’il est lisible et écrit assez vite, ce qui est bien plus difficile avec le script… L’écriture scripte est souvent choisie au tournant du collège lorsque les jeunes souhaitent personnaliser leur écriture. Néanmoins, ce choix amène l’inconvénient de ralentir l’écriture. Dans l’écriture scripte, chaque lettre est formée pour elle-même, à l’opposé de la cursive – du latin currere, courir – où la liaison entre les lettres permet de simplifier le tracer et d’aller plus vite. En script, on lève le crayon très souvent ce qui prend du temps. Les ados sont souvent réticents à revenir à la cursive. La rééducation va alors proposer des négociations et des petites astuces pour rattacher les lettres à bon escient et trouver un équilibre qui permettra de ne pas perdre la personnalisation… et de gagner en vitesse.
Combien de temps dure une rééducation ? Quel en est le coût ?
Une rééducation dure en moyenne entre 5 et 8 cours et dépasse rarement les 10 séances. Tout dépend des difficultés de l’élève et de son implication. Si les exercices sont faits avec sérieux et assiduité, les résultats sont visibles au bout de quelques cours. Certains élèves qui ont des difficultés particulières (dyspraxie, dysgraphie, troubles de l’attention…) ont besoin de plus de temps mais obtiennent de réels progrès. Chaque séance de 45 à 50 min coûte 60 euros. Le règlement peut se faire par chèque, virement ou espèces. Il n’y a pas de remboursement sécurité sociale mais quelques mutuelles et comités d’entreprise peuvent prendre en charge les séances. Renseignez-vous aussi si vous ou votre enfant avez un dossier MDPH.
Y a-t-il un âge limite pour démarrer une rééducation ?
Dès qu’un enfant a l’âge de tenir un crayon en main, on peut lui apprendre à bien le tenir. L’écriture cursive est enseignée à partir de la Grande Section de maternelle, c’est souvent le bon moment pour intervenir si de mauvaises habitudes sont en train d’être prises, tant dans la tenue du crayon que dans la formation des lettres. Il n’y a pas d’âge limite pour rééduquer son écriture. Les adultes et les séniors font d’excellentes rééducations, car ils sont souvent très motivés et peu de séances suffisent. Dans certains cas, dystonie ou handicap, cela dure un peu plus longtemps mais l’enjeu est majeur (conserver ou retrouver une écriture fluide, lisible, confortable) et les résultats sont là.
Qu’est-ce que vous conseillez comme stylo pour démarrer ?
Pour un premier apprentissage, le crayon à papier serait l’outil le plus adapté : il est facile à manier, peut être gommé, ne tâche pas. Il existe des crayons à section triangulaire avec divers systèmes anti-dérapants. Au cabinet, on aime bien les picots proposés par Faber Castell Grip 2001, les encoches des Stabilo Easy Grapho ou Lyra Groove Slim. Pour les stylos, les rollers sont conseillés, ils glissent facilement et sont aisés à manier. Pensez aussi à voir certains stylos ergonomiques proposés dans le commerce. Le bic est plutôt déconseillé car il impose de verticaliser le crayon ce qui n’est pas la meilleure position. Le stylo plume permet, quand on sait le manier, une vraie souplesse d’écriture. Il existe des modèles adaptés (comme le Schneider Breeze ou le Stabilo Easy Original). Attention, certains modèles proposent des modèles pour droitiers et gauchers. Au fond, c’est un peu comme des chaussures de sport, c’est avant tout un choix personnel et propre à chacun. Le mieux, c’est d’essayer. En cours de rééducation, les élèves ont à disposition plusieurs stylos qu’ils peuvent ainsi « tester » afin de choisir ce qui leur convient.
Je souffre d’une dystonie, la rééducation peut-elle m’apporter un bénéfice ?
Quand la position ou tenue de crayon est inconfortable, des douleurs peuvent s’installer au point d’engendrer une réelle dystonie – ou crampe de l’écrivain – ayant pour conséquence une réelle incapacité à écrire. Parfois, celle-ci est accompagnée de mouvements anormaux incontrôlables, qui ne se manifestent qu’au moment de prendre un crayon : c’est la dystonie fonctionnelle ou crampe de l’écrivain. C’est plus fréquent qu’on ne croit, beaucoup d’enseignants par exemple sont concernés. Dans ce cas, les kinésithérapeutes peuvent soulager la douleur. En parallèle, la rééducation en cabinet visera à déprogrammer les mouvements générateurs de douleurs et de tensions et surtout à engrammer une nouvelle posture et tenue de crayon permettant d’écrire à nouveau. Ces rééducations sont souvent plus longues qu’une rééducation ordinaire: on travaille ensemble, en équipe, petit à petit. Parfois, certaines personnes souhaitent apprendre à écrire de l’autre main, ce qui est également possible.
Mon enfant est autiste, la rééducation est-elle adaptée pour lui ?
Bien sûr ! Les progrès sont souvent importants. Néanmoins, il faut que l’enfant ait accès à un certain niveau de langage et des bases de lecture pour profiter de la rééducation. De même, il faut qu’il puisse rester assis plusieurs minutes consécutives, si ce n’est pas le cas, le travail est prématuré et il profitera beaucoup mieux de séance chez un psychomotricien par exemple qui permettront de travailler en amont. N’hésitez pas à me poser vos questions plus précises pour que nous puissions en discuter.
La rééducation est-elle accessible aux enfants atteints de trisomie 21 ?
Bien sûr ! Toutefois, cela prendra un peu plus de temps que pour d’autres enfants. Petite astuce : favorisez à la maison le travail côte à côte pour éviter l’effet miroir qui augmente l’emploi de la main gauche et installe parfois des troubles de la latéralité. Faites travailler les doigts de votre enfant dès deux ans pour lui permettre un jour d’écrire (gym des doigts, manipulations, motricité fine, etc…).
Mon enfant est excellent à l’école, il a de très bonnes notes mais l’écriture est catastrophique, je ne comprends pas… J’ai peur que ça finisse par lui porter préjudice, j’ai beau lui dire de s’appliquer, cela crée de fortes tensions au moment des devoirs…
C’est un profil que l’on retrouve plus souvent que vous n’imaginez en cabinet. Les enfants précoces, notamment, rencontrent parfois des difficultés d’écriture. Les séances individuelles éclairent ces enfants là sur les enjeux d’une rééducation en les impliquant dans le processus.
Est-ce que c’est vraiment important l’écriture manuscrite, alors qu’on a des claviers un peu partout maintenant (téléphone, ordi, tablette, etc…) ?
Je dirais oui ! De nombreuses études et articles soulignent actuellement l’importance de l’écriture manuscrite, en particulier en termes d’apprentissage et de mémorisation. Certaines écoles, aux Etats-Unis par exemple, avaient abandonné cet apprentissage au profit des claviers et ont vite changé d’avis face aux résultats de leurs élèves. La graphopédagogie, malgré les claviers, devrait avoir de l’avenir !…